L'archipel Lenoir

Dix minutes d'égarement valent depuis plusieurs semaines au chef de la famille Lenoir des séances déplaisantes chez le juge d'instruction et, depuis l'instant même, un mandat d'amener — heureusement sus-pendu grâce à l'intervention du prince Boresku dit Bobo, un cousin par alliance. Le policier venu procéder à l'arrestation a accepté de surseoir jusqu'au lendemain matin. D'ici là, les Lenoir chercheront le moyen d'éviter le scandale.
Bobo en suggère un : la mort du délinquant qui éteint l'action judiciaire. L'idée fait son chemin en dépit de l'opposition véhémente de l'intéressé. Adolphe, le gendre, se charge de veiller à l'exécution de la décision — donc de son beau-père. Une détonation retentit.
Chacun, emprisonné dans son égoïsme et ses préjugés comme une île reliée seulement aux autres par l'intérêt, voilà ce qu'est l'archipel Lenoir, que bouleverse au matin la réapparition du grand-père — premier des coups de théâtre qui amènent à son dénouement cette satire brillante et amère de la société contemporaine. La pièce a remporté un vif succès lors de sa création en 1947 par Charles Dullin, ami de longue date d'Armand Salacrou qui évoque avec fougue son souvenir.

Source : Le Livre de Poche